« L’ego croit jouer seul la pièce de sa vie, mais le Soi en est le théâtre, le metteur en scène et le témoin. » Valérie GALENO-DELOGU
Sur la scène intérieure, un acteur paraît. Il se nomme « Ego ». Costume ajusté, gestes assurés, il croit que toute la pièce dépend de lui. Il parle fort, prend la lumière, se prend pour l’auteur, le metteur en scène et le roi à la fois. Mais derrière le rideau, les coulisses bruissent : une armée de voix oubliées attend son heure.
L’ombre se lève, première révolte. Figures refoulées, émotions bâillonnées : colère, honte, désirs interdits. Elles envahissent le plateau, bousculent l’acteur. L’Ego hésite : fuir, se battre, ou accueillir ? C’est son premier passage, accepter que la pièce n’est pas faite de lumière seule.
Puis surgissent d’autres personnages, étranges et fascinants : le féminin inspirateur, le masculin porteur d’élan. Parfois séducteurs, parfois terribles, ils sont médiateurs. Ils tendent des miroirs, ouvrent des passages vers des royaumes plus vastes. L’Ego danse, lutte, s’accorde. Le dialogue s’installe.
La scène se métamorphose alors. Les décors se couvrent de symboles : forêts de rêves, océans mythiques, figures d’archétypes. Le langage ordinaire se tait, remplacé par celui des images. L’Ego apprend à marcher dans ce théâtre mouvant, à laisser l’imaginaire guider ses gestes.
Au centre, une lumière douce apparaît. C’est le cœur de la scène. Ici, les contraires s’équilibrent. L’acteur cesse de dominer, il devient médiateur. Sa danse s’adoucit, ses gestes s’harmonisent. Il comprend que sa tâche n’est pas de régner mais de relier.
Et puis, un silence tombe. Plus de décor, plus de voix. Quelque chose d’immense traverse le théâtre : le numineux, l’infini, le mystère. L’acteur tremble, car il n’est plus le maître. Sa voix se brise, ses gestes deviennent offrande.
Enfin, le rideau s’ouvre sur un espace sans bord. L’Ego découvre qu’il n’est qu’un fragment d’une totalité vivante. Le Soi est là, invisible et pourtant partout : spectateur, metteur en scène, et théâtre lui-même. L’acteur n’est pas effacé : il trouve enfin sa juste place, interprète d’une œuvre infinie.
La pièce n’a pas de fin. Chaque geste, chaque souffle, rejoue ce drame éternel : l’ego qui croit être tout et le Soi qui doucement le rappelle à l’unité.
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